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Un gouvernement d’intérêt national : Pourquoi y aller et pourquoi faire ?

Bien avant les résultats des élections, bien avant le début de la campagne électorale, Ettakatol a appelé à la formation d’un gouvernement d’union nationale ou d’intérêt national pour la période des travaux de l’assemblée constituante [1]. Pourquoi cette démarche et pourquoi maintenons-nous le cap ?

Nous vivons aujourd’hui une situation exceptionnelle, les élections du 23 Octobre ont marqué un premier pas, que nous estimons réussi, vers l’avènement d’une démocratie affirmée mais nous n’y sommes pas encore. L’écriture de la constitution sera dans l’année à venir l’élément fondateur de cette démocratie et il est crucial que nos élus puissent s’y consacrer pour aboutir à un texte en phase avec la société tunisienne dans son ensemble et en phase avec sa révolution qui demande une rupture avec l’ancien régime et ses pratiques. Travailler dans la sérénité et l’apaisement, rechercher le consensus, tels sont les enjeux pour la rédaction d’une constitution viable dans le temps et qui pourra régir notre vie politique pour plusieurs décennies.

Pour rechercher cette sérénité, il nous semble important d’évacuer aujourd’hui les querelles politiques (naturelles et souhaitables en démocratie) en lien avec la gestion à court terme du pays. Nous ne pouvons pas être pour l’instant dans un scénario classique d’une majorité qui gouverne et d’une minorité qui critique et propose une alternative. Nous devons, pour cette phase très courte, unir nos efforts pour mener le pays à bon port. Les objectifs du gouvernement doivent être d’abord et avant tout de garantir la sécurité, la stabilité et d’envoyer un message très clair à l’ensemble des tunisiens afin de les rassurer et qu’ils puissent réellement entrevoir l’espoir que demain sera un jour meilleur.

Nous devons d’abord nous réconcilier entre nous-mêmes, accepter l’autre et ne pas oublier que la société tunisienne est une société d’ouverture et de modération. Mais il ne faut pas oublier que la réconciliation nécessite une phase de vérité sur les exactions commises par l’ancien régime et une phase de justice transitionnelle sur laquelle le gouvernement doit travailler en toute urgence. Toutes les forces politiques qui veulent réellement rompre avec l’ancien régime peuvent y contribuer et peuvent s’unir pour y aboutir.

Le gouvernement à venir ne pourra pas mener toutes les réformes, il ne pourra pas d’une baguette magique créer des emplois pour résorber tout le chômage, il ne pourra pas effacer tous les signes de pauvreté indignes de la Tunisie. Mais ce gouvernement doit s’y atteler dès aujourd’hui. La lutte contre la disparité régionale, la précarité, le chômage et la pauvreté doivent faire partie des urgences de ce gouvernement. Toutes les forces politiques, qu’elles soient de droite ou de gauche, sont unanimes à ce sujet et peuvent aussi s’unir pour y contribuer.

Tels sont quelques enjeux de ce futur gouvernement, y participer à plusieurs c’est aussi donner un signe d’une Tunisie apaisée en route vers une démocratie pérenne loin des clichés malheureusement véhiculés en occident et en France en particulier. Nous devons éviter la bi-polarisation de la vie politique qui pourrait être source de tensions sachant que les résultats des élections montrent que les tunisiens ne sont pas favorables à cette confrontation d’un bloc qualifié de séculaire et d’un bloc qualifié d’islamiste. Les tunisiens nous disent que les enjeux sont aussi ailleurs, les enjeux sont aussi économiques et sociaux. Nous pensons que les tunisiens aspirent à une vie digne dans une société ouverte.

Un gouvernement d’intérêt national c’est aussi donner une assurance de sécurité et de stabilité à l’entreprenariat national et étranger afin de redémarrer notre économie et d’avoir les moyens de nos ambitions de redistribution des richesses.

Pourquoi alors nos amis politiques proches et même certains de nos sympathisants éprouvent une réticence à cette perspective ? Ne tournons pas autour du pot ! Le mouvement Ennahdha fait peur car beaucoup voient en lui, à tort ou à raison, une image d’un islamisme radical qui a fait énormément de dégâts dans d’autres pays. Ennahdha est un mouvement politique conservateur de droite loin de nos idéaux de progrès social. A lui aujourd’hui de montrer qu’il est réellement converti à la démocratie et qu’il est réellement attaché aux libertés individuelles. Il peut le faire dès aujourd’hui en étant très ferme face à des agissements, dans les universités par exemple, de certains groupuscules rétrogrades qui se réclament de sa mouvance. A lui de le montrer dès aujourd’hui en étant extrêmement vigoureux et en coupant réellement les ponts avec des mouvements salafistes extrêmement minoritaires en Tunisie. A lui de donner aujourd’hui des gages de sincérité sur ces intentions face à la préservation des acquis de la femme et du Code de Statut Personnel. A lui d’arrêter le jeu du double discours où un de ses leaders principaux envoie des messages d’apaisement en ce sens tout de suite rattrapés par des déclarations alarmantes du leader historique de ce mouvement.

Certes nous sommes convaincus du besoin de travailler tous ensemble, mais si ces garanties ne sont pas satisfaites il sera difficile à Ettakatol de participer à ce futur gouvernement. Nous ne serons jamais la caution morale d’un pouvoir politique qui risque de revenir sur les acquis de la société tunisienne. Jamais, jamais et jamais nous ne transigerons sur nos principes et nos valeurs.

Mais quelle que soit la composition du gouvernement à venir, avec ou sans la participation d’Ettakatol, nous lui souhaitons la réussite car son échec sera subi par les plus démunis,  par ceux même qui ont amené cette révolution de la dignité dont nous sommes tous fiers.

Que les forces de progrès (partis politiques et société civile) soient convaincues qu’aujourd’hui, on ne peut pas se permettre de laisser le pouvoir à un seul parti dominant. Etre dans le gouvernement, faire entendre sa voix de l’intérieur, est un meilleur gage de préservation des principes auxquels tous les progressistes tiennent. Rejoignez nous dans cette dynamique pour l’intérêt du pays et pour garantir une meilleure transition démocratique.

Wahbi JOMAA
Pour Ettakatol France



[1] Conférences de presse du 22 Septembre et du 15 octobre

Un commentaire

  1. Bravo ,je retrouve bien l’esprit que j’ai aimé chez tktl. Puissions nous avoir la pédagogie nécéssaire pour relayer ce message au delà de nos microcosmes FB

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