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Mustapha Ben Jaafar: Chacun doit appliquer la feuille de route sur des bases claires

Extrait d’une interview accordée au  journal Le Parisien

Le président de l'Assemblée constituante de Tunisie, Mustapha Ben Jaafar. (c) Fethi Belaïd

Le président de l’Assemblée constituante de Tunisie, Mustapha Ben Jaafar. (c) Fethi Belaïd

Président de l’Assemblée nationale constituante, Mustapha Ben Jaâfar est également le chef de file des socialistes tunisiens. Son parti Ettakatol fait partie de la troïka (avec Ennahda et le Congrès pour la République du président Marzouki) qui dirige le pays sous la houlette des islamistes. Homme de consensus, ce médecin de formation se veut au dessus de la mêlée. Il accorde un entretien exclusif au «Parisien» au moment où la Tunisie entre dans un processus de dialogue pour sortir de la crise.

Ennahda va t-il jouer le jeu et se retirer du gouvernement pour sortir de la crise ?
Nous sommes dans une véritable crise de confiance. Chacun doit appliquer la feuille de route sur des bases claires. Discuter la constitution et l’adopter dans un délai de trois semaines, changer de gouvernement et engager un processus électoral avec une instance indépendante. Le scénario est précis et ne doit pas dépasser les deux semaines. On sait que cela ne va pas être simple, mais je suis confiant.

Concrètement, les élections législatives auront lieu quand?
A priori un délai de 5 à 6 mois devrait être considéré comme suffisant et accepté par tout le monde. Elles pourraient avoir lieu en avril prochain.

Certains craignent un volte-face des islamistes, et vous ?
Evidemment, on craignait que leurs engagements pour une nouvelle équipe au pouvoir ne soient pas assumés. Or, avec cette feuille de route, signée, tout le monde va être jugé par l’opinion publique. Le risque de temporisation existe chez tous les partenaires. Ennahda ne doit pas être chargé plus que d’autres. Ses responsables ont eu beaucoup d’hésitations mais, aujourd’hui, ils sont obligés d’accepter le jeu démocratique et de respecter les règles instaurées pour un changement de gouvernement. Ennahda fait une très grande concession mais il ne veut pas quitter le pouvoir avec le sentiment d’être dégagé, sans avoir l’assurance d’un scrutin très prochainement.

L’opposition pense que les islamistes s’accrochent au pouvoir…
Oui, ce qu’on reproche aujourd’hui à la troïka et principalement à Ennahda, c’est de s’accrocher au fauteuil. Et la crainte d’Ennahda, c’est de voir une nouvelle équipe, elle aussi, jouer la montre et remettre les élections à plus tard. Dans ce climat de crise, chacun se méfie de l’autre.

Craignez-vous un scénario à l’égyptienne ?
On ne cesse de dire que la Tunisie n’est pas l’Egypte. Ca suffit. Même Ben Ali tenait le même discours: attention ces gens là sont des terroristes potentiels, il faut les mettre en prison ou les exiler. Il a utilisé ce prétexte pour réprimer tout le monde. En définitive, il a mis les islamistes en prison et n’a pas été tendre avec les démocrates. Il a tout verrouillé. La peur doit être définitivement chassée. Bien sûr, l’exemple égyptien est là devant nous. Ennahda en tire ses conclusions, c’est certain que son comportement actuel est influencé par l’exemple égyptien.

Vous êtes confiant pour l’avenir…
Il y a lieu d’être optimiste même si la crise a perduré. Il y a eu des moments très difficiles avec les deux assassinats politiques (NDLR: l’avocat Chokri Belaïd et le député Mohamed Brahmi). C’est cela qui a le plus perturbé le processus de transition. Le reste est le résultat d’une opposition qui a cherché à garder la posture d’une contestation systématique. Certes, il y a des dérapages, des erreurs certainement, des fautes au niveau de la gouvernance, tout cela n’est pas contestable. Mais sachez que s’il n’y avait pas eu ces tragédies, on serait peut être en train d’organiser les élections. Car, à la veille de ces assassinats, on était prêts pour l’adoption de la constitution et donc, organiser des élections. On a perdu du temps, mais, le dénouement est proche.

Et si Ennahda revenait en force aux prochaines élections ?
Non. Il y a, indiscutablement, des modifications dans le paysage politique. Avec de nouvelles formations, des anciens du régime de Ben Ali qui reprennent du poil, l’apparition de Nida Tounes qui capte les mécontents et donne de l’espoir aux anciens RCD. Forcément, il y aura un vrai changement.

Paris a salué cette feuille de route… Qu’attendez-vous de la France?
Qu’elle soutienne le processus de transition et qu’elle garde cette distance. La France se tient au côté de la démocratie avec vigilance et solidarité. C’est une grande amie de la Tunisie. Quant à la non ingérence, on la demande à tout le monde…

>>>>> Accéder à l’article d’origine sur le site LeParisien.fr

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